I have a dream

Publié le par Lucien


 
 La nuit dernière, chose parfaitement inhabituelle chez moi, j'ai fait un double rêve, un peu comme si j'avais subi une double-pénétration de mon subconscient.


 Déjà que ça ne m'arrive pas souvent de m'en rappeler ne serait-ce que d'un, alors là, deux dans la foulée, c'était Broadway.

 Comme j'étais dans un état second et pas très frais, je n'ai pas eu le courage de me lever pour retranscrire tout ça dans le feu de l'action.

 Je ne suis malheureusement pas comme certaines personnes qui, volontairement, se lèvent systématiquement en pleine nuit pour écrire, profitant de cet état semi-conscient pour coucher sur le papier des mots qui ne seraient jamais sortis en plein jour.


 De plus, il faut dire que je sortais d'une petite soirée-boulot un peu arrosée, d'où j'avais fait la connaissance de quelques collègues plutôt "intéressantes" que je ne connaissais ni d'Eve ni d'Adam, et pour cause, elles ne font pas partie de mon service.

 Le fait est que vers 5 heures du mat, je me suis réveillé plutôt excité et en nage et que je me suis empressé de retranscrire sur un post-it le contenu de ces deux rêves successifs, bien distincts l'un de l'autre mais tout de même assez proches dans l'esprit.

 Dans le premier, j'étais visiblement quelqu'un de relativement connu et je me retrouvais au coeur d'une immense fête qui m'était apparemment destinée.
 Je reconnaissais autour de moi pas mal de mes amis parisiens de la bande des dégringolés et ce qui était plutôt cocasse dans cette situation, c'était que cette fête était organisée par Carl de Canada en personne, ennemi juré de la bande.

 Il y avait tout plein de "modasses" qui papillonnaient autour de moi et qui essayaient visiblement de se placer de manière assez intéressée, preuve supplémentaire de ma célébrité, même si ce qui me gênait dans l'histoire c'est que je n'arrivais pas à réaliser d'où venait cette reconnaissance.

 J'avais un peu l'impression d'avoir été "parachuté" à l'épicentre de ce vortex sans trop savoir pourquoi et que je faisais semblant de jouer un rôle de composition dans une totale improvisation, un peu comme si on m'avait placé dans un train ultra-rapide que je prenais en marche, sans savoir d'où il venait ni où il se dirigeait.

 C'était un mélange de sensations assez désagréables car je ne suis pas habitué à me retrouver sous les feux de la rampe, et en même temps assez grisantes car j'avais un peu l'impression d'être comme un coq en pâte et qu'il me suffisait de claquer des doigts pour avoir tout ce que je voulais.

 De même j'étais surpris de voir le parasitage de certaines vieilles connaissances perdues de vue depuis des lustres, qui me faisaient des courbettes comme si on avait toujours été les meilleurs amis du monde.
La fête battait son plein et les pires excès sévissaient autour de moi lorsque j'abandonnais ce doux cocon pour embrayer sur le second rêve.


 Changement de contexte, ambiance beaucoup plus terre-à-terre et également beaucoup plus réaliste.
Je me retrouvais téléporté en plein colloque professionnel, celui sur lequel je bosse depuis déja plusieurs semaines et qui contribue à me stresser au plus haut point.
Comme il s'agit d'un colloque interne à ma boîte, il se trouve que je connaissais la majorité des personnes composant le public.
Il devait y avoir une bonne centaine de collègues dans la salle de conférences et je me sentais minuscule et énormément vulnérable, seul au centre de cette immense estrade.
Tétanisé par le trac et l'enjeu peu habituel pour moi, je me suis, en l'espace d'un dixième de seconde, imaginé dans la peau d'un héros de one man show, ce qui m'a permis d'endosser un masque et de balayer d'un coup toute forme de stress.

 La suite relevait du surréalisme. Je me suis mis à déclamer la totalité de mon speech assez rébarbatif à la manière nonchalante et cynique d'un Franck Dubosc du secteur tertiaire.
 On était à mi-chemin entre "l'Extension du Domaine de la Lutte" et "On a tout essayé".
 Résultat des courses, ce qui devait être à la base une mise à mort lente et humiliante, se transforma en une grande bronca, l'auditoire était conquis et éclatait de rire à chacune de mes tirades.
 A la fin, j'eu même droit à une standing-ovation interminable.
 Certains collègues de mon service essayèrent même d'entamer une hola dans le grand amphithéatre.

 A cet instant précis, j'eus cette terrible révélation en direct et sans l'avoir préméditée:
je venais de trouver ma vocation, j'étais prédestiné à une carrière dans le comique.
Après toutes ces longues années mortelles en recherche et développement, je reçus en pleine face cette lumière aveuglante qui me montrait ouvertement la voie.
Jusqu'à présent, je me contentais juste de faire mon mariole à la cafet et au resto d'entreprise, testant un peu mon humour sur mes proches collègues, ce qui me valait au passage le respect de certains et un amour transi pour d'autres.
Je n'avais encore jamais eu l'occasion de tester mon humour à grande échelle devant un auditoire un peu plus fourni.

 Le pot qui suivi le colloque ne fit que confirmer ma nouvelle aura.
Toute la boîte se pressait pour me féliciter, des chefs de service me tapaient dans le dos comme de vieux potes, mes proches collaborateurs en profitaient pour se faire mousser en clamant à tout va qu'ils me côtoyaient au quotidien depuis des années, certaines collègues lointaines venaient me congratuler en usant de leurs charmes, profitant de leurs tenues d'apparat pour me faire perdre la raison. Peut être même que dans le tas il devait y en avoir quelques unes qui étaient présentes à la vraie soirée qui avait précédé ce rêve, et peut être même qu'elles devaient m'avoir royalement ignoré ce soir-là.

 C'est sur cette impression de revanche assez grisante que s'échoua mon second rêve.
Evidemment je fis rapidement le rapprochement entre les deux, comprenant mieux maintenant pour quelle raison je m'étais retrouvé quelques minutes plus tôt au sein de cette immense party branchée.
C'est la première fois que j'enchaînais deux rêves si liés l'un à l'autre, et surtout si réalistes et dépourvus de détails stupides et délirants comme souvent dans la plupart des rêves.

 Je ne sais pas si c'est prémonitoire mais ce qui est sûr, c'est que dans quelques semaines, quand je vais monter sur la grande estrade de la salle de conférences de ma boîte, je pourrai difficilement ne pas y penser, et au pire, même si ça ne se passe pas vraiment comme dans mon rêve, ça me permettra au moins d'évacuer mon trac...
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